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Il me semble parfois que mon sang coule à flots,
Ainsi qu’une fontaine aux rythmiques sanglots.
Je l’entends bien qui coule avec un long murmure,
Mais je me tâte en vain pour trouver la blessure.

A travers la cité, comme dans un champ clos,
Il s’en va, transformant les pavés en îlots,
Désaltérant la soif de chaque créature,
Et partout colorant en rouge la nature.

J’ai demandé souvent à des vins captieux
D’endormir pour un jour la terreur qui me mine ;
Le vin rend l’oeil plus clair et l’oreille plus fine !

J’ai cherché dans l’amour un sommeil oublieux ;
Mais l’amour n’est pour moi qu’un matelas d’aiguilles
Fait pour donner à boire à ces cruelles filles!

 

Charles Baudelaire, Les fleurs du mal, 1857.

***

Mi par che a volte il sangue mi scorra fuori a fiotti,
come una fonte scossa da singhiozzi dirotti;
io sento che con murmure lungo da me dilaga,
ma, per quanto mi palpi, non so trovar la piaga.

Filtrando dentro i rioni, come in chiusi ridotti,
va mutando le selci in natanti isolotti;
la sete del creato copiosamente appaga,
e imporpora ogni erba, ogni acqua, ogni plaga.

Ho chiesto a scaltri vini l’inganno di una remora,
contro il terror che insonne nell’anima mi cova:
ma il vino occhi ed orecchi aguzza a tutta prova!

Nell’amore ho cercato il torpore che smemora…
ma m’amore è null’altro che un letto d’aghi ov’io
devo a crudeli femmine spartire il sangue mio!

(trad. di Gesualdo Bufalino)

 

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